Communiqué de Thierry Ruf : "Les feux de forêt auraient pu être mieux traités"

Le feu de forêt de Fontanes-Guzargues-StBauzile de Montmel-Assas-Teyran aurait pu être beaucoup mieux traité si le réseau d’irrigation de BRL avait été sollicité dès la première alerte, le 30 aout à 16h.
Pour nous tous, il ne fait guère de doute que le feu déclaré à Fontanes est criminel. Ce départ intervient au moment même où les efforts des pompiers de l’Hérault sont consacrés à l’incendie de Mèze, là où des habitations sont très menacées. Ce n’est pas le cas à Fontanes. Mais la progression du feu vers le sud de Fontanes a surpris tous les observateurs et notamment ceux du CCFF1 de Jacou qui ont assisté, en début de soirée, du côté du Lien, à l’arrivée brutale des flammes et à la transmission du feu au delà de cette grande route censée faire un barrage naturel aux incendies de forêts. Heureusement, dans la nuit et le lendemain matin, tous les moyens disponibles permettaient de fixer le feu à proximité des villages d’Assas et de Teyran. Sans cet immense effort, le feu aurait probablement progressé vers Clapiers, Jacou et aurait ainsi touché de nombreuses zones habitées et boisées. Il est probable d’ailleurs que les citoyens de ces communes n’aient pas conscience du risque encouru dans la nuit du 30 au 31 août, alors que ceux d’Assas et de Teyran ont vécu cette forte expérience : le feu peut arriver rapidement dans les périphéries et au coeur même des villages, autour de Montpellier comme autour des grands centres urbains du Languedoc.
Les pompiers et les autorités en charge ont souligné combien la présence des vignes avait permis de ralentir le feu de Fontanes. Effectivement, la juxtaposition de champs cultivés et de forêts est un élément fondamental pour l’harmonie des paysages méditerranéens entre l’Ager et le Saltus. Il vaut mieux éviter de trop longues continuités d’espaces boisés secs et inflammables. La plupart des bois ne sont pas bien entretenus et l’absence de liens entre agriculture, forêts et pâturage ovin donne à cet espace un caractère de danger permanent. Or, si certains ont tenté d’améliorer les choses, notamment à Guzargues, en favorisant l’implantation de terrains cultivés, globalement la zone qui a brûlé se présente comme une énorme mèche à proximité de l’agglomération de Montpellier. Elle avait connu a peu près le même sort en 1989. Y-a-til une fatalité comme certains le disent ? La catastrophe est humaine et écologique, mais elle doit être revisitée dans son déroulement, car un des moyens de lutte contre les incendies n’a pas fonctionné, faute de préparation et d’adaptation des matériels et des personnes.
Depuis 1989, sur décisions et financements des autorités publiques nationales, régionales, départementales et communales, la région nord-Est de Montpellier a connu une progression du réseau d’irrigation sous pression de BRL, la compagnie régionale d’aménagement du Bas-Rhône-Languedoc. Le réseau est particulièrement dense sur Montaud et Saint Bauzille de Montmel. Il a aussi progressé sur trois axes principaux vers l’ouest, en plein dans la zone qui a brûlé : l’axe Saint Bauzille-de-Montmel – Fontanès, l’axe de Guzargues et l’axe de Teyran. (voir carte jointe) Dans ces villages, des aménagements spécifiques ont eu lieu pour donner aux habitants l’accès aux eaux brutes et arroser leurs jardins sans gaspiller les eaux potables. Mais l’équipement réalisé concerne bien d’autres espaces puisque BRL a pratiquement installé des bornes sous pression à proximité de toutes les zones cultivées en vigne. Malheureusement pour la compagnie (et pour tous les citoyens qui ont payé ces infrastructures), la pratique de l’irrigation ne s’est pas développée et la plupart des bornes ont aucun client ni usage. Il n’empêche qu’elles constituaient une ressource en eau distribuée sur différents sites ravagés par les flemmes. Leur emploi n’est signalé nulle part, sauf peut être du côté Est à Saint Bauzille et à Montaud où des personnes disposaient de contrat d’eau et pouvaient ouvrir les vannes.
Le Maire de Guzargues, M. Pierre Antoine, témoigne que les habitants du village ont défendu leur maisons en arrosant leur jardins et c’est la raison principale de la préservation de l’habitat. Il souligne aussi qu’il avait indiqué la présence des bornes BRL… mais les pompiers n’avaient pas à leur disposition les raccords nécessaires entre ces bornes d’arrosage et leurs tuyaux.
Il ne s’agit ici pas de polémiquer inutilement. Il s’agit simplement de constater que le feu a traversé deux lignes de distribution d’eaux du Rhône mises sous pression sans que ces ressources aient été utilisées à bon escient, faute d’une préparation, d’une information et d’une adaptation des moyens et des hommes ?
Il ne s’agit pas seulement des pompiers et du remplissage des camions. On aurait pu avoir un autre scénario lorsque le feu s’est déclenché au nord de Fontanès. Mettre en action le plus de bornes d’arrosage possible en mettant en place des canons d’irrigation le plus vite possible pour arroser les bandes forestières en profondeur à proximité des vignes et tenter ainsi de limiter le plus possible le développement du feu aux seuls endroits non arrosables. En deuxième ligne, l’axe de Guzargues aurait aussi pu servir à mouiller un maximum de bandes forestières. Il y avait quelques heures devant soi avant l’arrivée des flemmes, si la première barrière de Fontanès avait été dépassée par le feu. En troisième ligne, l’axe de Teyran pouvait aussi contribué à protéger et contenir le feu, et on pourrait même ajouter l’axe de la Draye et Viviers à Jacou qui pouvait sans doute aider à protéger les bois de Viviers (ce domaine de 300 hectares vient d’être acheté par l’agglomération de Montpellier avec en perspective la création d’une écolothèque sur l’eau)
La fonction anti-incendies est une caractéristique présente dans tous les systèmes traditionnels d’irrigation dans le monde. Elle vient d’ailleurs d’être rappelée à une conférence internationale sur la gestion de l’eau en montagne. Les formations végétales qui accompagnent les canaux forment un bocage très efficace contre la progression du feu. Lorsque l’on modernise les réseaux d’arrosage et que l’on enterre les conduites, la fonction anti-incendie doit toujours être présente.
Nous appelons donc à une réflexion locale, départementale et régionale pour imaginer des systèmes d’action coordonnés contre les feux intégrant tous les éléments et les acteurs possibles.
Thierry Ruf Conseiller municipal Europe-écologie Jacou
A consulter : Cartes des axes d’arrosage et de l’aire soumise au feu du 30 et 31 août 2010.