Solidarité en Droit

Si la liberté est une condition, l’égalité est un devoir, la fraternité/sororité doit être une obligation.

Les problématiques environnementales peuvent donner à fraternité ou la sororité ce relief de solidarité parce que l’individu n’a plus le choix. Etre solidaire doit devenir aujourd’hui l’objectif et nous permettre de répondre aux besoins de «care» et aux impératifs environnementaux.

La définition de la fraternité est déjà une œuvre philosophique. Il faut s’écarter du sens commun : du sens familial ou amical pour étendre l’acception au domaine social. La sororité se présente alors comme l’équivalent féminin de fraternité. Le mot est souvent invoqué comme une revendication féministe, il n’est pas encore d’un usage commun, habituel. Lorsque l’on tente de conférer à la fraternité ou la sororité une dimension concrète pratique, c’est à la solidarité qu’il est fait référence.
Alors, il semble que la solidarité est, concrètement, l’expression sociale de la fraternité.

Aujourd’hui, l’article 2 de la Constitution du 4 octobre 1958 précise que : « La devise de la République française est « Liberté, Egalité, Fraternité » » Elément de ce triptyque, la fraternité est le point de la devise qui a été le plus discuté, parfois contesté, souvent négligé.
Aujourd’hui, le concept de fraternité est devenu un complément présenté comme socialement indispensable au principe d’égalité, une notion permettant le rebond politique de l’égalité en palliant les insuffisances de l’innovation théorique du principe d’égalité. La fraternité n’est plus seulement dotée d’une dimension morale ou moralisante.
Elle est souvent présentée un concept susceptible de doter l’égalité sinon d’une plus grande efficacité sociale, du moins d’une ampleur moderne, susceptible d’offrir le cadre d’une réponse aux enjeux politique et écologiques actuels.

Concept de fraternité et armature juridique
La fraternité est une affirmation politique ancienne ; la reconnaissance juridique est nuancée. Longtemps, la fraternité s’est distinguée des deux autres éléments de la devise française par sa dimension morale. Les arrêts du Conseil d’Etat, les décisions du Conseil constitutionnel sont anciens et innombrables concernant le principe d’égalité. Beaucoup d’études doctrinales analysent le contenu et les modulations du principe d’égalité : si l’on admet que toutes personnes placées dans la même situation doivent être traitées de la même manière, il est établi que des personnes placées dans une situation différentes n’ont pas droit à un traitement différent. Après la discrimination positive, il a été question d’égalité compensatoire…

Depuis 2018, en droit français, la fraternité est reconnue comme un principe à valeur constitutionnel (Décision du Conseil constitutionnel n°2018-717/718 QPC du 6 juill. 2018, « M. Cédric H. et autre »).

Ce n’est que récemment que le concept de fraternité tend à être doté d’une armature juridique qui, sans être contraignante, pourrait devenir plus objective.

Nécessité d’adaptation et transposition de la notion de fraternité
Aujourd’hui, les exemples sont multiples où l’on invoque le principe de fraternité : la continuité pédagogique en période d’urgence sanitaire pendant l’épidémie de COVID...
L’entraide pourrait s’imposer là où la solidarité devient déterminante. Le creusement des inégalités socio-scolaires ravive la nécessité de penser et de trouver des porteurs des valeurs sociales et de l’Etat providence. Toutefois, il faut admettre que la notion de fraternité a aujourd’hui besoin d’être adaptée, transposée. Il ne s’agit pas que d’une déclinaison de vocables. Ce concept central est, justement, l’interdépendance humaine. La fraternité est un principe structurant de l'ordre juridique, de toute démocratie, une matrice des valeurs constitutionnelles. Sur cet indice de maturité de l'État de droit repose l'impératif de la protection de l'environnement.